Le myosotis*
Jérôme Bergami, 02 août, 2015
C'est une petite fleur
Qui ne joue pas les starlettes
Un beau citron est en son coeur,
Qui sourit,
Lui fait fraîche collerette
Le bleu tendre de ses pétales
Ronds commes des oreilles
De souris.
Sans mentir
C'est là son étymologie,
Du grec qu'elle tire
Son logis.
C'est une fleur du monde entier,
Pas un pays où elle n'ait ses quartiers.
Une dure de dure !
Qui pousse le long des murs,
S'affiche aux devantures
Des boutiques, des restaurants, des cafés,
A l'arrière des voitures.
Certaines s'épanouissent dans les boîtes aux lettres,
D'autres sur les portes, elles brillent près des sonnettes.
J'en ai vu aux fontaines des bords de route
Blotties contre la pierre des défunts.
Mais encore sur les frigos, les bancs publics, les autobus, les panneaux de signalétique —
Parait-il qu'il en est même dans des églises, collées sur l'ambon !
Elle est de toutes les montagnes où le climat se trouve bon.
C'est une fleur de combats douloureux,
Une fleur qui dit : « J'existe, sois heureux. »
C'est une fleur de chemin ensemble,
Une fleur qui dit : « Mais tu trembles ! »
C'est une fleur que l'on tend
A toutes les âmes en peine ;
Une qu'Apollinaire en son temps
Eût fait glisser sur la Seine
Avec ses amours.
Ici on la connait bien
Pour l'entendre nuit et jour
A travers le pays
Murmurer de sa petite voix
Cette prière :
"Ne m'oublie pas, ne m'oublie pas, ne m'oublie pas."
*en 2015, le myosotis a été offciellement choisi pour commémorer le centenaire du génocide arménien. Dans de nombreuses langues (par exemple en anglais, "Forget me not"), cette fleur est appelée : "Ne m'oublie pas"